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Le sort des loyers commerciaux durant la période juridiquement protégée du COVID

Le 17 avril 2021

Face à la crise sanitaire liée à la COVID-19, le gouvernement a pris depuis mars 2020 de nombreuses ordonnances afin d'adapter les textes législatifs (report des délais de procédure, modification du mode de représentation aux audiences, etc ...) et mis en place diverses aides à l'attention des PME-TPE.

Dans sa volonté de venir en aide aux plus petites entreprises, l'une des mesures les plus importantes a été la mise en place de la suspension des loyers commerciaux pendant les périodes liées au confinement, notamment avec l’ordonnance n° 20202-316 du 25 mars 2020 et la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020.

I/ l’article 4 de l’ordonnance n° 20202-316 du 25 mars 2020

 

Tout d’abord aucune des ordonnances prises durant la période du premier confinement liée au COVID-19 ne prévoyait systématiquement une interdiction de poursuivre pour les loyers impayés durant la période juridiquement protégée.

 

Toutefois les entreprises pouvaient, sous certaines conditions, demander la suspension des loyers, ce qui ne veut pas dire une annulation mais un report.

 

Les professionnels qui pouvaient bénéficier de cette mesure étaient ceux qui étaaient éligible au fonds de solidarité., c'est-à-dire les TPE ou les micro entreprises qui remplissent 3 conditions cumulatives :

-          CA < 1 millions d’Euros

-          Bénéfice < 60 000 €

-          Dont l’activité était interdite dans le cadre des mesures prises pour lutter contre le Covid-19 ou ayant perdu 50% du CA en 03/2020, 04/2020 ou 05/2020 par rapport au même mois de 2019

 

Ce décalage va concerner les loyers qui devaient être réglés depuis le 12/03/2020 ou qui seront dus dans les deux mois de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

 

Par contre le locataire ne pouvait pas de son chef suspendre le paiement des loyers, et devait donc, pour pouvoir bénéficier de la mesure, en informer son bailleur et justifier non seulement de ce qu’il était éligible mais également de ce qu’il avait déposé une demande pour bénéficier du fonds de soutien.

 

Pour cela il devait adresser au propriétaire :

 

-          Une déclaration sur l’honneur attestant de ce qu’il remplit les conditions rappelées ci-dessus

-          L’accusé réception du dépôt de la demande qu’il aura adressé au fonds de solidarité.

Ce régime d’état d’urgence sanitaire, créé provisoirement, est resté en vigueur presque 16 semaines jusqu’au 10 juillet 2020. 

Face à la hausse des indicateurs clés du suivi de l'épidémie de COVID-19, cette mesure exceptionnelle a de nouveau été déclarée par un décret du 14 octobre 2020, à partir du 17 octobre pour un mois.

Le gouvernement a donc promulgué la loi n°2020-1379, lui permettant de prolonger ou rétablir les dispositions prises lors du premier confinement, et c'est dans son article 14, que nous allons retrouver les dispositions concernant le sort des loyers commerciaux

 

II/ l’article 14 loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020

 

1.      Acteurs économiques concernés

Cet article reprend, en le complétant, le dispositif qui était déjà prévu par l’article 4 de l’ordonnance n° 20202-316 du 25 mars 2020 (resté en vigueur jusqu’à la fin de la période protégée mise en place à l’occasion du premier confinement),  afin de protéger les petits acteurs économiques affectés par la crise contre toute sanction liée à un retard de paiement ou au non-paiement de leurs loyers.

Le I de l’article 14 de la loi précise que sont visés par ce dispositif de protection : “les personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique affectée par une mesure de police administrative” prise en application, depuis le 17 octobre dernier (date du début du couvre-feu dans certaines régions) :

 - soit du régime de l'état d'urgence sanitaire inscrit dans le code de la santé publique ;

- soit du régime transitoire prévu par la loi du 9 juillet 2020.

C’est le décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020, publié au Journal officiel du 31 décembre 2020 qui vient préciser les conditions auxquelles ces entreprises doivent satisfaire pour bénéficier de la protection offerte par l'article 14.

 Peuvent ainsi prétendre bénéficier du dispositif protecteur de l’article 14 de la loi du 14 novembre 2020, les personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique affectée par une mesure de police administrative qui   :

- emploient moins de 250 salariés ;


- ont réalisé un chiffre d’affaires (CA) inférieur à 50 M€ lors du dernier exercice clos (ou, pour les activités n’ayant pas d’exercice clos, un chiffre d’affaires mensuel moyen inférieur à 4,17 M€) ;


- et ont subi une perte de CA d’au moins 50 % au titre du mois de novembre 2020 par rapport au mois de novembre 2019 ou, au choix de l’entreprise, par rapport au CA mensuel moyen de 2019.


S’agissant des entreprises créées entre le 1er juin 2019 et le 31 janvier 2020, il convient de prendre en compte le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020 ; pour celles créées entre le 1er février 2020 et le 29 février 2020, le chiffre d’affaires réalisé en février 2020 et ramené sur un mois ; et pour celles créées après le 1er mars 2020, le chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé entre le 1er juillet 2020, ou à défaut la date de création de l’entreprise, et le 30 septembre 2020.

Concernant les entreprises ayant fait l’objet d’une mesure d’interdiction d’accueil du public, le chiffre d’affaires réalisé au mois de novembre sur leurs activités de vente à distance avec retrait en magasin ou livraison ne doit pas être pris en compte pour calculer le chiffre d’affaires de référence du mois de novembre 2020.

 

Attention : l’article 2 du décret du Décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020 vient apporter une précision sur les modalités de mise en œuvre du dispositif de protection et sur la charge de la preuve des critères d’éligibilité.

Afin de pouvoir prétendre au bénéfice de la protection de l’article 14 de la loi du 14 novembre, les entreprises concernées doivent attester du respect de ces conditions en produisant une déclaration sur l’honneur. Cette déclaration est accompagnée de tout document comptable, fiscal ou social permettant de justifier ce respect, la perte de chiffre d’affaires étant établie sur la base d’une estimation.

Les entreprises de moins de 50 salariés qui bénéficient de l’aide servie au titre du fonds de solidarité peuvent justifier de leur situation en présentant l’accusé-réception du dépôt de leur demande d’éligibilité au fonds de solidarité au titre du mois de novembre 2020, accompagné de tout document comptable ou fiscal permettant de justifier qu’elles ne dépassent pas le niveau de chiffre d’affaires requis (selon les cas, 50 M€ ou 4,17 M€ mensuel moyen).

 

2.      Dettes concernées.

Le dispositif protège ces acteurs contre le "retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux” et dus à compter du 17 octobre.

Il faut préciser toutefois que le dispositif prévu à l’article 14 de la loi ne suspend pas les loyers dus par les acteurs économiques concernés (qui pourront donc continuer à les payer valablement).

 

3.      Mécanisme de protection mis en place.

Jusqu’à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la date à laquelle leur activité cesse d'être affectée par la mesure de police administratives, ces acteurs économiques ne pourront « encourir d'intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée ». 

 

4.      Conséquences.

Seront donc suspendus et interdit de mise en œuvre : 

- les sanctions prévues éventuellement au contrat (clause pénale, clause résolutoire) ;

- la mise en demeure de payer faisant courir les intérêts moratoires ;

- la résiliation unilatérale ou judiciaire du bail ;

- les voies d'exécution forcée contre les biens des preneurs ;

- les mesures conservatoires ;

- les sûretés réelles (gage, nantissement...) ou personnelles (cautionnement même solidaire, garantie autonome...) garantissant le paiement des loyers et charges locatives concernés ;

- toute action en responsabilité contractuelle. 

En outre, les procédures d'exécution qui auraient déjà été engagées par le bailleur pour non-paiement de loyers antérieurs à la période où leur activité est affectée par une mesure de police sanitaire, ou antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi sont également suspendues.

 

En pratique :

-          Les loyers et charges exigibles « protégées » sont celles des acteurs économiques protégés, à partir du 17 octobre. 

-          Pour ces « dettes protégées » :

les mesures d’exécution forcée sont suspendues, ainsi que celle qui auraient été prises depuis le 17 octobre et qui n’ont pas déjà produit leurs effets; ne sont donc pas remises en cause les mesures d’exécution forcée ayant déjà produit leurs effets, notamment les saisies-attributions à exécution successive qui ont déjà produit leur effet attributif immédiat ;


les mesures d’exécution forcées pourront reprendre deux mois après la fin de la mesure de police affectant l’acteur économique protégé (ex. : fermeture du commerce par exemple) ;


en revanche, pendant toute la période, les loyers et charges échus pourront être compensés avec une dette du bailleur, dans les conditions fixées par les articles 1347 et s. du Code civil ;


l’exigibilité des loyers et des charges n’est pas suspendue : les preneurs peuvent valablement continuer à les payer ;


les mesures de recouvrement amiable restent également autorisées.

 

5.      Date d’entrée en vigueur du texte.

La loi est d’application immédiate, et s’applique aux loyers et charges locatives dus pour la période au cours de laquelle l'activité de l'entreprise est affectée par une mesure de police, c’est-à-dire à partir du 17 octobre (date du début du couvre-feu). Ce texte est donc d’une portée rétroactive, pour les mesures d’exécution qui n’ont pas encore été mises en œuvre ou qui n’ont pas produit leurs effets.

 

Que vous soyez bailleurs ou locataires la SAS HUISSIER-06 est à votre disposition pour vous renseigner, alors n'hésitez pas à nous contacter